Création de la fonction de juge chargé du contrôle des expertises civiles au sein de chaque juridiction



Décret n° 2012-1451 du 24 décembre 2012 relatif à l’expertise et à l’instruction des affaires devant les juridictions judiciaires

Objet : création de la fonction de juge chargé du contrôle des expertises civiles au sein de chaque juridiction ; mise en œuvre de mesures d’information concernant la rémunération des experts ; critères d’inscription sur les listes d’experts judiciaires

Entrée en vigueur : les dispositions des chapitres II et IV du texte entrent en vigueur le premier jour du deuxième mois suivant sa publication. Les autres dispositions entrent en vigueur le lendemain de la publication.

Notice : le décret modifie le code de l’organisation judiciaire afin de permettre la désignation dans chaque juridiction d’un juge chargé du contrôle des expertises.

Il modifie certaines dispositions du code de procédure civile relatives à la rémunération des experts en prévoyant une obligation pour l’expert de demander au juge une provision supplémentaire en cas d’insuffisance manifeste de la provision initiale et en instaurant la possibilité pour les parties de présenter des observations sur la demande de rémunération. Le juge qui ordonne une expertise devra désormais motiver la désignation d’un expert qui ne serait pas inscrit sur les listes établies par les cours d’appel ou la cour de cassation.

Le décret énumère de manière non limitative les critères qui pourront être pris en compte pour accepter ou rejeter une demande d’inscription sur une liste des experts judiciaires. Enfin, la procédure orale devant le tribunal de commerce est modifiée. Il est créé un juge chargé d’instruire l’affaire qui coordonne la procédure avant renvoi devant la formation de jugement. Ce juge peut faire un rapport oral à l’audience avant les plaidoiries.

Parole de l'enfant et enquête sociale

Pelly de MONTVALON, Enquêtrice sociale à l’Assoedy

La parole de l’enfant dont il va s’agir est celle recueillie au civil dans nos enquêtes ou expertises psychologiques, reflet de l’aménagement de la vie de l’enfant dans un moment de rupture qui est la séparation de ses parents.

Mises en conditions, rencontres
Nos interventions se font aux domiciles de l’enfant où après avoir observé son fonctionnement dans la famille, nous nous isolons avec lui, hors d’écoute des adultes. J’insiste sur les conditions de ces rencontres qui gardent un caractère beaucoup plus intime que celles qui ont lieu dans les cabinets du juge ou de l’avocat. L’enfant rassuré par son cadre de vie se laisse aller à parler assez librement
Nous lui expliquons d’abord le but de notre présence, mise en mots d’une situation qu’il peut avoir entendue par un de ses parents, ou par les deux, mais dont il peut tout aussi bien ne pas avoir entendu parler. Et ce quelque soit son âge, parce que même un très jeune enfant comprend que quelque chose ne va plus entre papa et maman et a besoin de mots explicatifs lui permettant de comprendre et de se rassurer.
A lui de s’exprimer sur la situation qu’il vit entre ses deux parents : depuis la séparation, il vit chez qui ?
Il voit l’autre comment ? Cela lui convient-il ? Si non comment pourrait-on aménager différemment ?
Nous ajoutons que nous sommes son porte-parole c'est-à-dire que nous reporterons ses propos au juge dans un rapport qui sera lu par ses deux parents. Si nous le voyons hésiter, nous essayons de voir avec lui ce qui l’inquiète - peur de réactions violentes, peur de faire de la peine, refus de s’engager - tout en cherchant à lui faire comprendre qu’on ne peut rien faire de ses non dits.
Ensuite l’entretien diffère selon l’âge des enfants :

Audition de l'enfant : analyse d'un magistrat

Sophie BRAIVE, Vice-présidente aux Affaires Familiales,
Tribunal de Grande Instance de Versailles
Toute l’éducation ancienne procédait d’une pratique qui demandait à l’enfant d’être sage et de se taire.
Dans la conception moderne de l’enfant, ce dernier est invité à donner son point de vue dans les relations familiales, mais également dans la justice.
Pour traiter de la parole de l’enfant je retiendrai la définition de la Convention Internationale des droits de l’enfant du 20 novembre 1989 : “tout être humain âgé de mois de 18 ans”.
L’expression de ses sentiments par l’enfant est prévue dans plusieurs domaines de notre droit et notamment :
- art 311-23 du code civil : en cas de changement de nom en cas d’établissement du second lien de filiation et durant la minorité de l’enfant, le consentement personnel de l’enfant est nécessaire s’il a plus de 13 ans,
- art 345 du code civil : en cas d’adoption plénière le consentement personnel de l’enfant est nécessaire s’il a plus de 13 ans,
- article 375-1 du code civil et art 1183 du NCPC. : En cas d’assistance éducative, l’audition par le juge des enfants est de principe si le mineur est capable de discernement,
- en cas de procédure de divorce entre époux de nationalités différentes la demande d’audition du mineur doit être impérativement formée.
Limitation de mon intervention à l’audition de l’enfant dans le cadre des modalités d’exercice de l’autorité parentale étant juge aux affaires familiales et non juge des enfants, une intervention étant en outre prévue cet après midi.

La parole de l’enfant devant le Juge aux Affaires Familiales

La parole de l’enfant devant le Juge aux Affaires Familiales « vue » par l’avocat d’enfant.

Marie-Laure HOUDAILLE, Avocat d’enfant au Barreau de Versailles


J’espère que vous n’arrivez pas aujourd’hui pour avoir des réponses : depuis que j’exerce, cela fait un peu plus de 15 ans en tant qu’avocat d’enfant, plus j’avance et plus j’ai de questions.
A Versailles, un groupe d’avocats d’enfants à titre expérimental a été institué depuis 20 ans; Une Charte nationale des avocats d’enfant est en cours d’élaboration.
Nous avons un échange mensuel sur nos dossiers et autres questions rencontrées dans notre activité d’avocats d’enfants.
Il y a un vadémécum des avocats d’enfants à Versailles, pour tenter une homogénéisation des pratiques, mais il y a à peu près autant de conceptions que d’avocats.
Les avocats d’enfants ont signé une convention avec l’ordre des avocats. Notre indépendance est autant que possible protégée par notre désignation par le bâtonnier, c'est-à-dire qu’on ne dépend ni financièrement ni d’autre manière des parents.

Les rendez-vous au Cabinet de l’Avocat d’enfant
Quelques mots notamment sur les rendez-vous à notre cabinet, puisqu’en effet nous avons le côté secret possible et c’est même la première vocation des rendez-vous à notre cabinet à savoir que nous pouvons dire à l’enfant : « ce que tu me dis ici reste en principe secret, sauf ce que tu m’autoriseras à en dire ».

L’audition de l’enfant : réelle avancée ou risque d’instrumentalisation ?


Par Nolwen LEROUX
Avocate au barreau de Paris

Après plusieurs années de mise en application, la question se pose…
C’est la Convention internationale relative aux droits de l’enfant du 20 novembre
1989 dont nous venons de fêter le 20ème anniversaire, qui a la première consacrée le droit à la parole pour l’enfant au niveau international.
En France, il faudra attendre la loi du 8 janvier 1993 pour que le droit positif donne une réelle place à l’audition de l’enfant. L’article 388-1 du Code civil prévoit alors la possibilité pour le mineur capable de discernement d’être entendu dans toutes les procédures le concernant, le Juge disposant toutefois de la possibilité d’écarter la demande d’audition par une décision spécialement motivée.
La loi du 4 mars 2007 a modifié l’article 388-1 du Code civil en prévoyant que « l’audition est de droit quand le mineur en fait la demande ».
Pendant deux ans, en l’absence du décret d’application, il existait une grande disparité entre les juridictions, chaque Tribunal, voire chaque Juge ayant sa propre manière de faire : audition directe du mineur par le Juge, désignation systématique d’un tiers pour l’audition (psychologue, enquêteur social, etc…), établissement d’un compte rendu d’audition plus ou moins complet selon les souhaits de l’enfant, etc…

DES ENQUETEURS SOCIAUX DANS L’EMISSION « REPORTAGES » SUR TF1.

LE TRAVAIL DES ENQUETEURS SOCIAUX DANS L’EMISSION « REPORTAGES » SUR TF1.

Revoir l'émission : suivre ce lien TF1 Reportages
Le traitement des sujets de société dans une émission grand public relève souvent de la gageure. La place de l’image et du témoignage relègue le commentaire approprié à la portion congrue avec le risque d’une information insuffisante du téléspectateur pouvant le conduire à des compréhensions erronées.
Les courageux professionnels qui acceptent d’être filmés on rarement de l’influence sur la ligne éditoriale et ont parfois le sentiment d’avoir été instrumentalisés.
Le reportage de TF1 contient de nombreux ratés que le responsable de l’émission aurait pu éviter.

Le choix des enquêteurs (une psychologue et un policier à la retraite)
Cette présentation  caricaturale est loin de refléter la composition sociologique des quelques 600 enquêteurs sociaux du territoire. Elle ne tient pas compte de l’évolution de la profession au cours des vingt-cinq dernières années avec l’arrivée massive d’enquêteurs titulaires d’un Diplôme d’Etat dans le champ des sciences sociales avec un référentiel de compétences national.

POUR UN DIPLOME D'ETAT D'ENQUETEUR SOCIAL

Le décret du 12 mars 2009 institue un statut de l’enquêteur social comparable dans sa forme à celui des experts judicaires. S’il s’agit d’un succès pour les organisations qui ont collaboré à sa rédaction, une imprécision demeure quant au niveau de qualification exigé dans le document final.
S’agissant de la qualification requise, le second alinéa de l’article 2 comprend cette formule : Exercer ou avoir exercé pendant un temps suffisant une profession ou une activité, notamment dans le domaine social ou psychologique, en relation avec l’objet des enquêtes sociales
Cette formulation exprime en creux l’absence de diplôme d’état pour la mission d’enquête sociale alors qu’une qualification précise est exigée pour l’ensemble des autres domaines de l’expertise judiciaire. Elle se situe dans la logique de l’évolution de la forme et du contenu de l’enquête sociale depuis vingt-cinq ans. A la description quasi photographique et moralisante des enquêteurs sociaux des années soixante-dix, recrutés parmi les retraités des effectifs policiers ou de la gendarmerie, s’est substitué une analyse de la dynamique familiale et du projet parental. Cette mutation qui bénéficie d’abord aux justiciables a été possible par l’arrivée d’enquêteurs dont la majorité des formations se situe dans le champ des sciences sociales avec comme sanction un diplôme d’Etat dont le référentiel est national. De la même manière, les sciences sociales sont devenues un outil indispensable à la formation des magistrats.